La révision de la loi anti-tabac au Niger, les parlementaires face à l’histoire

L’industrie du tabac et ses alliés font feu de tout bois pour bloquer le processus et empêcher la révision de la loi antitabac au Niger en utilisant tous les moyens allant de la désinformation à l’intoxication.

SOS Tabagisme-Niger est la première organisation de la société civile nigérienne active en matière de lutte contre le tabac. Depuis une vingtaine d’années, elle œuvre aux côtés des gouvernements, des partenaires africains et internationaux pour faciliter l’adoption des mesures législatives et réglementaires adéquates en matière de lutte contre le tabac. C’est ainsi qu’en 2005 SOS Tabagisme-Niger a engagé un retentissant plaidoyer qui a abouti à la ratification par le Niger de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT) puis à l’adoption d’une loi antitabac au Niger en 2006.

Douze ans plus tard, face aux conséquences désastreuses du tabac sur la santé des populations, SOS Tabagisme-Niger n’a pas faibli et se dresse au quotidien pour surmonter les défis placés devant elle tant par les lobbies politiques que par l’industrie du tabac au Niger et au plan mondial. Elle a engagé un autre plaidoyer auprès du Réseau parlementaire pour la lutte antitabac et du Ministère de la Santé publique pour réviser la loi antitabac qui date du 15 mai 2006. Pour cause : les principales dispositions sont devenues obsolètes car non conformes aux directives de la CCLAT, d’où la nécessite de l’adapter aux exigences du contexte à la fois international et national. C’est dans ce sens qu’elle a négocié et obtenu un appui technique et financier de l’ONG américaine Campaign for Tobacco-Free Kids (CTFK), pour engager ce travail dont le but est l’amendement de la loi en vue de la rendre plus efficace et conforme à la CCLAT. Cette initiative vise à prendre en compte dans la loi antitabac :

  1. les dispositions de l’article 5.3 de la CCLAT pour protéger les politiques de santé contre l’ingérence de l’industrie du tabac ;
  2. les directives de l’article 6 de la CCLAT relatives à l’adoption de mesures financières et fiscales contre le tabac qui ont le double avantage de réduire la consommation des produits du tabac et de renflouer les caisses de l’État ;
  3. les directives de l’Article 8 de la CCLAT qui disposent que les lieux publics doivent être 100% non-fumeurs afin d'avoir une interdiction complète de fumer dans les lieux publics ;
  4. introduire une disposition relative à la chicha dont la consommation prend de plus en plus d’ampleur dans notre pays ;
  5. la création d’une structure autonome chargée d’organiser et de coordonner la lutte contre le tabac dans notre pays, ce qui assurera la visibilité des actions de lutte contre le tabac réalisées par le Gouvernement et ses partenaires ;
  6. et toutes autres dispositions permettant de protéger les populations contre les effets dévastateurs de la consommation du tabac et de l’exposition à la fumée secondaire du tabac.

Les activités réalisées dans le cadre du processus…

Plusieurs activités ont été menées par SOS Tabagisme-Niger pour édifier l’opinion, les décideurs et les parlementaires sur la nécessité d’amender la loi antitabac au Niger. De la série des rencontres, on note celles des responsables de SOS Tabagisme-Niger avec SEM Ousseini Tinni, Président de l’Assemblée nationale, puis avec Dr Idi Illiassou Mainassara, Ministre de la Santé publique et avec la première Dame, Dr Lala Malika Issoufou, marraine de la lutte contre le cancer au Niger. A cela s’ajoutent, entre autres :

  • des rencontres de plaidoyer avec le représentant de l’OMS, le Ministre de la Santé publique et des présidents d’institutions de la République ;
  • une journée d’information et d’échanges avec les membres du Réseau parlementaire pour la lutte antitabac ;
  • une journée d’information parlementaire ;
  • des rencontres d’échanges et de mobilisation des structures intervenant dans la lutte contre le tabac et le cancer dont la Fondation Tattali-Iyali et l’ONG Tous unis contre le cancer (TUCC) ;
  • la visite en juillet 2018 de la Directrice Afrique de l’ONG Américaine Campaign for Tobacco Free Kids sur invitation de la Première Dame Dr Lala Malika Issoufou, marraine de la lutte contre le cancer et championne Afrique pour la lutte contre le tabac.

Amendement de la loi antitabac, l’espoir est permis…

Les participants à la rencontre de plaidoyer de SOS Tabagisme-Niger

La mise en œuvre de ces activités ont permis à SOS Tabagisme-Niger d’apprécier, à juste titre, le niveau élevé d’engagement des personnalités rencontrées qui ont, du reste, affirmé et réaffirmé leur soutien au processus de renforcement de la loi antitabac au Niger. Dans ce sens, un témoignage officiel de satisfaction a été décerné au Ministre nigérien de la santé publique et au représentant de l’OMS, M. Pana à l’occasion de la célébration de la Journée mondiale sans tabac 2018 par l’Alliance pour le contrôle du tabac en Afrique (ACTA) qui regroupe cent vingt-deux ONG et réseaux antitabac d’Afrique pour leur rôle et leur leadership salutaire en faveur du renforcement de la loi antitabac du Niger.

En plus, dix organisations internationales de santé publique, dont l’Union internationale contre la tuberculose et les maladies respiratoires, la Fondation ACBF qui gère les fonds de Melinda and Bill Gates Fondation sur le lutte contre le tabac, le CNCT de France ont adressé une lettre au Président de la République et au Président de l’Assemblée avec copie au Premier Ministre et au Ministre de la Santé publique pour apporter leur soutien au renforcement de la loi antitabac du Niger. La somme de tous ces soutiens tant au plan national que mondial est une forte raison d’espérer.

Les contraintes au processus…

En dépit de tout ce qui précède, le processus de plaidoyer conduit par SOS Tabagisme-Niger fera face aux contraintes liées au lobbying de l’industrie du tabac, qui y voit une menace sérieuse à ses intérêts. Fidèle à ses habitudes dans ce genre de circonstances, l’industrie du tabac et ses alliés font feu de tout bois pour bloquer le processus et empêcher la révision de la loi antitabac au Niger. A cette fin, cette industrie utilise actuellement tous les moyens allant de la désinformation à l’intoxication, et autres méthodes de pression dont elle seule a la maîtrise.

Dans tous les cas, rappelle SOS Tabagisme-Niger, le 25 octobre prochain, les parlementaires nigériens seront face à l’histoire comme en 2006 lors du vote de la loi antitabac. En 2006, malgré les pressions fortes d’alors, ils se sont pourtant assumés. Cette année, ils vont se prononcer sur la proposition de loi dont le seul but est la protection de la santé publique.

En prenant position en faveur de la proposition d’amendement de la loi antitabac, nos parlementaires marqueront assurément l’histoire du Niger. Ce sera un signal fort donné aux dirigeants africains et du monde sur la nécessité d’agir avec détermination pour lutter contre les maladies et réduire les décès imputables au tabagisme. Le tabagisme ne doit plus être une source latente de crise économique ou une crise sanitaire indépassable. Le tabagisme ne doit plus constituer un fardeau supplémentaire pour les peuples d’Afrique.

C’est tout le sens de la lutte menée depuis plusieurs décennies par SOS Tabagisme-Niger. Dans l’intérêt des populations victimes de tabagisme, vivement que l’Assemblée nationale se range du côté du Ministre de la Santé publique pour voter à l’unanimité la proposition de loi portant amendement de la loi antitabac.

SOS Tabagisme-Niger

 


2018.10.28/pad

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