La taxation des produits du tabac est le moyen le plus efficace de la réduction du tabagisme et en même temps permet de mobiliser davantage des ressources pour les États.
Du 29 au 31 juillet 2013, la société civile engagée dans la lutte antitabac s’est retrouvée à Ouagadougou autour de l’Alliance pour le Contrôle du Tabac en Afrique (ACTA), de l'American Cancer Society (ACS) et de l’Université du Cap (University of Cape Town - UCT) au cours d’un atelier de renforcement des capacités des acteurs de la lutte antitabac sur le plaidoyer sur la taxation des produits du tabac.
Dans la zone UEMOA, au total quatre pays (le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Niger et le Sénégal) ont répondu présents.
Vue d'ensemble de l'atelier
Me Mathieu Kohio, conseiller juridique représentant le Ministre de la santé du Burkina Faso, a situé les objectifs de cette rencontre :
accroître les connaissances des participants sur les concepts liés à la taxation du tabac;
établir une stratégie pour mettre en place une campagne de taxation dans chaque État;
élaborer des arguments pour un appui de chaque pays à toute réforme de la directive des taxes d’accises de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) dans une optique de santé et d’accroissement des ressources financières.
Le présidium de l'atelier, avec (deuxième depuis la droite)
Mathieu Kohio, représentant du Ministre de la santé
Ivan Blecher, de l’Université du Cap, Hana Ross de l'American Cancer Society, Florence Berteletti Kemp de The Smoke Free Partnership, Emmanuel Guindon de Campaign for Tobacco-Free Kids (CFTFK) et Kofi Ntie, économiste à l’OMS/AFRO, sont unanimes et formels : « La taxation des produits du tabac est le moyen le plus efficace de la réduction du tabagisme et en même temps permet de mobiliser davantage des ressources pour les États ».
La taxation est un moyen si efficace de lutte contre le tabagisme que l’industrie du tabac la redoute plus que tout autre. C'est par exemple la première préoccupation de Philip Morris, ainsi que le révèle un de ses documents internes que la compagnie a été obligée de rendre publics:
Aux États-Unis, ainsi que dans la plupart des pays où nous sommes implantés, il est clair que la taxation menace sérieusement notre existence. (...) Parmi toutes nos préoccupations, il en est une qui nous alarme le plus : la taxation. Si les restrictions sur le marketing et sur le tabagisme public et passif ont, elles aussi, des effets négatifs sur les volumes vendus, nous savons par expérience que les taxes dépriment le marché bien plus gravement. C’est pourquoi nous plaçons cette inquiétude au cœur de notre réflexion.... (1)
Durant ces trois jours de travaux, les experts ont édifié les participants sur les effets de la taxation des produits du tabac, qui sont :
Les experts
Une directive communautaire fixe le plafond de la taxation à 45% et cela bloque les pays à aller au-delà de cette taxe. Par exemple, le Togo est un pays où la taxe est déjà de 45%: il n'a plus la possibilité de l'augmenter. Le Secrétaire éxécutif d'ACTA, Fabrice Ebeh, a pris l’engagement d’apporter son soutien aux différents pays afin de pouvoir conduire à bon terme une campagne de taxation réussie. Tous les pays membres de l’UEMOA qui appliquent la taxe ad valorem ont été invités dans un premier temps à augmenter les taux d’imposition jusqu'à la limite supérieure de 45% et dans un second temps d’envisager le passage à la taxe spécifique, jugée bénéfique.
Dans le domaine du plaidoyer pour la lutte contre le tabagisme, selon Florence Berteletti Kemp, pour qu’un problème soit inclus dans l’agenda du gouvernement, il faut la rencontre de trois « courants »: le courant des problèmes, le courant des solutions et le courant des orientations : c’est la théorie de John Kingdon. Ces trois courants ont une vie indépendante les uns des autres et lorsqu’ils se rencontrent, une fenêtre d’opportunité s’ouvre : c’est en ce moment-là qu’il faut saisir sa chance car cette opportunité pourrait bien ne plus réapparaitre.
Hana Ross lors de sa présentation
En marge de cet atelier, le Ministre de la santé du Burkina Faso a accordé une audience à une délégation des participants composée des parlementaires, des points focaux, de la société civile et des experts. Le Secrétaire éxécutif d'ATCA a situé l’objet de l’atelier et sollicité l’appui du Burkina Faso à travers le Ministère de la santé pour que l’augmentation des taxes soit une réalité dans tous les pays membres de l’espace UEMOA. Prenant la parole, le Ministre de la santé, Léné Sebgo, a réaffirmé sa disponibilité à accompagner les acteurs de lutte antitabac et a souhaité que toutes les actions qui seront entreprises dans ce combat doivent appuyer les gouvernements dans leur quête perpétuelle de bien être de nos populations.
Dr LY Souleymane
Afrique Contre le Tabac (ACONTA)
Burkina Faso
(1) "With regard to taxation, it is clear that in the U .S ., and in most countries in which,we operate, tax is becoming a major threat to our existence. (...) Of all the concerns, there is one - taxation - that alarms us the most. While marketing restrictions and public and passive smoking do depress volume, in our experience taxation depresses it much more severely. Our concern for taxation is, therefore, central to our thinking..."
Extrait de "The Perspective of PM International on Smoking and Health Issues", discours, Philip Morris, 29 mars 1985, document ddg56b00 dans la Legacy Tobacco Documents Library de l'Université de Californie, San Francisco