Si les fumeurs étaient bien informés des multiples méfaits de la consommation du tabac, beaucoup n’auraient jamais commencé à fumer.
Depuis le 10 novembre 2015, les nouveaux avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes ont commencé à être sur les étals des vendeurs ambulants comme fixe au Tchad. Ces nouveaux paquets font fuir les fumeurs. Ceux-ci préfèrent acheter les anciens paquets de cigarettes avec les avertissements sanitaires en lettres très minuscules et dont les stocks commencent à s’amenuiser.
Selon les vendeurs, les fumeurs ont du mal à supporter les images du cancer de la bouche et du cancer du poumon qui figurent sur les nouveaux paquets. Selon Yaya Sidjim, coordonnateur du programme de lutte contre le tabac de l’Association de défense des droits des consommateurs (ADC), « cette réaction des fumeurs ne fait que confirmer l’efficacité des avertissements illustrées sous forme d’images dans les pays en développement comme le Tchad. » Et il poursuit : « Si les fumeurs étaient bien informés des multiples méfaits de la consommation du tabac, beaucoup n’auraient jamais commencé à fumer ».
L’évolution du contexte politique au Tchad est marquée par une volonté nouvelle du gouvernement, qui s’est inscrit dans la dynamique mondiale de lutte contre le tabagisme. Cette volonté s’est matérialisée par les actions importantes suivantes :
La ratification de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte anti-tabac en janvier 2006 ;
La création d’un Comité national de lutte contre le tabagisme regroupant différents acteurs concernés par la lutte anti-tabac ;
L’élaboration d’un cadre stratégique nationale de lutte contre le tabagisme ;
L’adoption par l’Assemblée nationale d’une loi antitabac promulguée en juin 2010 ;
La création d’un Programme national de lutte antitabac, alcool et drogues en 2014.
En 2015, le Tchad a franchi un grand pas dans la mise en œuvre de la Convention-cadre pour la lutte antitabac et de la loi portant lutte antitabac. Il s’agit de l’Arrêté N° 039 du Ministère de la Santé publique portant conditionnement et étiquetage des produits du tabac. Cet arrêté consacre l’application des avertissements sanitaires en images sur les paquets et cartouches des cigarettes. C’est une mesure très efficace de lutte antitabac. Elle répond au droit à l’information du fumeur qui doit être conscient du danger qu’il court en absorbant la fumée du tabac. Dans un pays comme le Tchad, où une bonne partie de la population est analphabète, les images peuvent servir de moyens efficaces de communication, d’information et de sensibilisation. C’est aussi une mesure qui prive l’industrie du tabac d’un support publicitaire très important, à savoir le paquet de cigarettes.
Les paquets de tabac avec avertissements sanitaires
sous forme d'images occupant 70% des faces principales
En adoptant les avertissements sanitaires en images, le Tchad se place ainsi parmi les pionniers de la région AFRO de l’OMS, car il est le quatrième après l’Ile Maurice, Madagascar et la Namibie à adopter cette mesure. De plus, avec des avertissements sanitaires qui doivent couvrir au moins 70% des faces principales, le Tchad devient ainsi le premier pays africain à atteindre un tel niveau de pourcentage de mise en œuvre des avertissements sanitaires, devançant ainsi l’Ile Maurice, le pionnier dans ce domaine avec 65% des faces principales.
Le ministre de la Santé publique, Dr Ngariera Rimadjita, après sa signature, a remis officiellement un exemplaire de l’arrêté au représentant de la Manufacture de cigarettes du Tchad (MCT), filiale de la multinationale Imperial Tobacco. C’était lors d’une réunion d’information et de communication organisée en collaboration avec l’Association pour la défense des droits des consommateurs (ADC), en vue de vulgariser l’arrêté n°039 portant réglementation du conditionnement et de l’étiquetage des produits du tabac au Tchad.
En novembre 2015, soit neuf mois jour pour jour après la publication de l’Arrêté N° 039 du ministre de la Santé publique, les premiers paquets de cigarettes comportant les avertissements sanitaires en images apparaissaient sur le marché. C’était le résultat d’un long processus mené par le ministère de la Santé publique, avec l'appui de la société civile à travers la coalition Stop tabac Tchad qui a fait un travail remarquable de plaidoyer. Il y a lieu de noter l’importance de l’appui financier et technique apporté par l’Union internationale contre la tuberculose et les maladies respiratoires. Cet exemple de partenariat a permis de réaliser plusieurs résultats dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac.
Le modèle de collaboration qui existe si bien entre le ministère de la Santé publique et la société civile dans divers domaines, et particulièrement en matière de lutte antitabac, est très appréciable et constitue une condition déterminante pour le succès de la mise en oeuvre de mesures efficaces de prévention.
2016.04.02/ys