Cameroun - Des ONG militent pour une augmentation des prix du tabac

L’heure est venue pour nous de prendre en main nos responsabilités, de protéger et de dissuader la nouvelle génération de fumer en rendant le coût d’achat du tabac élevé.

Douala, 6 septembre 2013 - On n’a pas fini de découvrir les méfaits du tabac. La plus récente desdites découvertes concerne l’emploi des additifs, ces substances -  à l’instar du menthol - dont les industriels bourrent le tabac depuis les années 1970 et qui constitueraient jusqu’à 10 % de son poids. Ces substances, ont découvert certains chercheurs, augmentent nettement la toxicité de la fumée, déjà riche en substances nocives pour la santé. Des risques connus depuis des décennies par les industriels qui les ont masqués en produisant des recherches biaisées. Or en dépit des campagnes de sensibilisation sur l’impact néfaste du tabac sur la santé, ce produit dangereux pour la vie fait tout de même l’objet d’une consommation quasi universelle.

D’après les observations de l’Alliance pour le contrôle du tabac en Afrique (ACTA), « les pauvres fument plus que les personnes à revenus élevés et gaspillent ainsi le peu d’argent qui devrait en principe être affecté à la nourriture et l’éducation. De ce fait, le tabac hypothèque le développement du pays ». En effet soutient Dr Flore Ndembiyembe, présidente de la Coalition contre le tabac au Cameroun (C3T), de nombreuses études ont montré que dans les pays à faible revenu, les ménages les plus pauvres consacrent plus de 10% de leurs dépenses au tabac.
 

Le Dr Flore Ndembiyembe, présidente
de la Coalition contre le tabac au Cameroun

Au niveau mondial, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que 61% de l’usage quotidien du tabac influence économiquement la population active qui se situe dans la tranche d’âge de 15-59. Au Cameroun, les dépenses de cigarette représentent en moyenne la moitié des dépenses alimentaires, selon C3T. De ce fait, « le tabac conduit à la malnutrition des populations, à la mort prématurée, à la hausse des dépenses sanitaires, à la déstabilisation des ménages… », déplore Dr Ndembiyembe qui appelle à l’action : « l’heure est venue pour nous de prendre en main nos responsabilités, de protéger et de dissuader la nouvelle génération de fumer en rendant le coût d’achat du tabac élevé ». En effet, dans les rangs des acteurs de la lutte contre le tabagisme, l’on est convaincu que l’augmentation des taxes sur le tabac et les produits de tabac est le moyen le plus efficace pour prévenir ou tout au moins réduire le tabagisme chez les jeunes et les plus démunis. Et par conséquent sauver des vies.

Taxé à 75% comme tout produit toxique

Et comment? Des prix élevés du tabac explique Dr Flore Ndembiyembe, incitent les fumeurs habituels à arrêter de fumer ; empêchent l’existence de potentiels consommateurs du tabac ; réduisent la quantité de tabac consommé par les fumeurs habituels. Comme pour donner raison à cette affirmation, un fumeur soutient avoir moins fumé lorsqu’il se trouvait en déplacement en France où le paquet de cigarette acheté au Cameroun à 1000Fcfa coûtait 4800Fcfa. Soit une marge de 3800Fcfa.

Afin de rendre cette vision réelle, la C3T avec le soutien d’un expert en taxation de l’Alliance pour le contrôle du tabac en Afrique, organise à Yaoundé, un atelier « pour permettre à ses membres de maîtriser les mécanismes de la taxation, les principales personnes qui peuvent intervenir dans l’atteinte de ces résultats pour enfin mettre en place un plan d’action dans le but d’arriver à une augmentation de cette taxation dans notre pays », justifie Dr Ndembiyembe. Il faut dire que selon une étude de l’OMS, lorsqu’on augmente les taxes de 10%, la consommation est réduite d’au moins 8%, soit 17,9 millions de personnes dans les pays à faible et à moyen revenu. « Donc c’est vraiment un levier important qu’il faut actionner dans la lutte contre le tabac », souligne Dr Ndembiyembe.

Loin d’être un aveu d’échec dans la tentative d’amener les fumeurs à ne plus consommer le tabac, ce plaidoyer est perçu comme une mesure complémentaire dans la lutte contre le tabac. Dans la mesure où elle viendrait en accompagnement à d’autres telles : la création d’espace non fumeurs, la mise sur les paquets des mises en garde sanitaires, de l’interdiction de fumer dans les lieux publics… En attendant une loi nationale sur le tabac dont le projet se trouve actuellement sur la table du premier ministre. L’augmentation de cette taxe d’accise devrait concerner tous les produits du tabac commercialisés. Toutefois, au-delà, la coalition pense que la cigarette et le tabac doivent être considérés comme un produit toxique, du poison et taxé à 75% comme le prévoit les dispositions légales en la matière.

Nadège Christelle BOWA

 

© Nadège Christelle BOWA | Le Messager

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